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France /Affaire Freeze Corleone: symbole flagrant d’une liberté d’expression à géométrie variable
Le rappeur de 28 ans, Freeze Corleone, de son vrai nom, Issa Lorenzo DIAKHATE, Franco-Sénégalais, originaire des Lilas en France est au cœur d’une polémique, qui a commencé par une plainte de la LICRA le 16 septembre 2020, qui a accusé le rappeur d’antisémitisme. Dans la foulée, Gérald DARMANIN, ministre de l’Intérieur, a annoncé qu’une action en justice sera initiée. Pourtant, ce cas de censure est frappant lorsque l’on se rappelle les propos récents de Nicolas SARKOZY sur un plateau télé, et le cas de Danièle OBONO, député française d’origine africaine, représentée en esclave dans un magazine de la droite conservatrice.
La 11 septembre 2020, Freeze Corleone sortait son premier album solo : « La menace fantôme« . Malgré le succès qui a instantanément suivi, 27 000 ventes la première semaine, ce n’est pas l’album qui fait parler de lui, mais plutôt une polémique qui a éclaté au lendemain d’une plainte de la Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisemitisme (LICRA), qui juge les paroles des chansons du rappeur comme appelant notamment à la haine envers les juifs.
Dans un court montage diffusé sur Twitter, la Licra a compilé les paroles « choc » du rappeur et appelé les plateformes de streaming musical, Youtube, Tidal, Deezer, Apple Music, Google Play Music, Spotify, Amazon Music, à le boycotter. Elle accuse encore Freeze Corleone, né Issa Lorenzo DIAKHATÉ, d’« Antisémitisme, complotisme, apologie d’Hitler, du IIIe Reich et du terroriste Mollah Omar ». Bref, du « hate money » (commerce de la haine, ndlr), à travers ses chansons.
Curieusement, la sphère politique s’est emparée de l’affaire suite la bulle médiatique qui a préalablement gonflé, ce qui a conduit à l’abandon du jeune rappeur par son label, Universal France. Le ministre de l’Intérieur a annoncé notamment l’ouverture prochaine d’une instruction judiciaire. En dépit de cette tourmente, le rappeur bénéficie du soutien de ses fans et de la communauté rap de France. Mais cette affaire, qui se distingue par son caractère foncièrement racialiste et identitaire, a de quoi faire pâle comparaison à côté de la polémique suscitée dernièrement par Nicolas SARKOZY et aussi le cas Danièle OBONO.
En effet, on a encore en mémoire le passage récent de l’ancien président français sur le plateau de l’émission “Quotidien”, où il comparaît maladroitement l’usage du mot « singe » à celle du mot « nègre ». Les heures qui suivirent ont été marquées par un tollé qui était cantonné aux réseaux sociaux, sans plus. Pourtant, le discours avait de quoi faire hérisser les poils des plus fervents défenseurs de la justice social et les acteurs de la lutte contre le racisme, dont la Licra.
De même, avant la tempête SARKOZY, il y a eu l’affaire Danièle OBONO, député française d’origine gabonaise, qui avait été dépeinte en esclave noire dans les colonnes vernissées du magazine ultra-conservateur “Valeurs Actuelles”. Au lendemain de ladite publication, l’élue de la France Insoumise est montée au créneau à travers quelques émissions télé et radio sans que ses complaintes n’émeuvent le moins du monde les plus preux chevaliers du combat contre le racisme.
Ces deux derniers exemples posent à nouveau la question de la liberté d’expression en République Française. Cette question est : Qui peut dire quoi sur qui ? Qui est la voix autorisée pour se rire ou critiquer ou évoquer une communauté particulière ? Pour le cas SARKOZY, un homme blanc qui ironisait sur des mots offensants pour les noirs. Pour l’affaire OBONO, c’était un média qui prenait à parti une ressortissante de la communauté noire africaine. Freeze Corleone, garçon des cités d’origine africaine, a maille à partir avec la communauté juive qui s’est indignée de son style lyrique.
Au final, le constat est bien que la ligne est de plus en plus floue entre ce qu’il est permis de dire et ce qui est acceptable par une communauté ou une autre. Mais la polémique autour de Freeze Corleone est bien le symbole d’une liberté d’expression inégalement comprise et appliquée par des groupes d’opinion. Éventuellement, avec l’instruction judiciaire qui va s’ouvrir, la justice pourra trancher sur ce que l’opinion a déjà diversement interprété à tort ou à raison…