Politique
Gabon pays le plus riche d’Afrique : “une affirmation malheureusement erronée” pour le RPM
Dans un article signé de Ilyes ZOUARI, ci-devant président du Centre d’étude et de réflexion sur le Monde francophone (CERMF) et publié le 12 octobre dernier dans les colonnes de la revue Financialafrik, “le Gabon consolide son statut de wzWWWEWpays le plus riche d’Afrique devant le Botswana″. Selon le CERMF le positionnement du Gabon, pour la deuxième année consécutive, se justifie entre autres par un produit intérieur brut (PIB) de 8017 $ par habitant début 2022. Une bonne performance qui résulte de la diversification économique mise en œuvre depuis une décennie, ainsi que de diverses réformes administratives et fiscales. Dans le but de sortir le pays, de sa forte dépendance aux industries extractives, et transformer localement une partie de la production, le pays a créée la Zone économique spéciale (ZES) de Nkok ainsi que d’autres zones industrielles, dans le but de transformer localement les matières premières avant leur exportation. Une politique qui a notamment a permis de multiplier par deux le poids de la filière Bois dans l’économie nationale, qui a pesé pour 5 % du PIB et 15 % des exportations de marchandises en 2021, soutient le rapport. L’on notera aussi le plan d’accélération de la transformation (PAT) de l’économie gabonaise lancé en 2021, qui a pour but d’industrialiser le pays en s’appuyant grandement sur le développement de la filière bois et de l’agriculture, ainsi qu’investir dans les services en développant notamment le secteur du numérique, et plus récemment le tourisme.
Le rapport du CERMF classe les pays du continent en dehors des très petits pays « ne pouvant être pris en compte pour l’établissement de comparaisons pertinentes en matière de richesse et de développement économique et social, en raison d’une très faible population (moins de 1,5 million d’habitants) et d’une superficie particulièrement réduite, avec un territoire parfois à peine visible sur une carte géographique » (l’Ile Maurice, les Seychelles et la Guinée équatoriale, qui affichent une richesse par habitant supérieure, mais dont la population est comprise entre 0,1 et 1,5 million d’habitants, et dont le territoire est très limité. Par exemple, la Guinée équatoriale et Maurice, sont respectivement 9,5 fois et plus de 130 fois moins étendues que le Gabon). Avec une superficie de 267 667 km² le Gabon est peuplé de 2,3 millions d’habitants. 8e producteur africain de pétrole (et le 36e au niveau mondial) le Gabon est le deuxième producteur africain et le 3e mondial de manganèse (et en passe d’en devenir le second, derrière l’Afrique du Sud).
Le classement du CERMF est contesté par le parti Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM) Dans un publication relayée par Échos du nord (n°789 du lundi 24 octobre 2022, ndlr), le parti d’Alexandre BARRO CHAMBRIER (ABC) estime qu’il est erroné de dire que le Gabon est le pays le plus riche d’Afrique. Le RPM énumère trois raisons. La première pointe le PIB, qui, selon ABC et les siens, n’est plus aujourd’hui un indicateur fiable de mesure de la richesse d’un pays. En fait, le PIB comme mesure de richesse ne tient pas compte des inégalités, la dégradation de l’environnement, les besoins de base à l’instar de l’éducation, la santé, l’habitat, l’eau, l’électricité, la sécurité, etc. D’autres indicateurs plus réalistes sont actuellement utilisés pour mesurer la richesse d’un pays, notamment l’indice de développement humain (IDH) développé par le PNUD qui est de 0,706 en 2021 au Gabon selon le FMI et l’IDH ajusté des inégalités qui oscille autour de 0,5 plaçant le Gabon au huitième rang en Afrique, Maurice, les Seychelles, l’Algérie, l’Egypte, la Tunisie, la Libye et l’Afrique du Sud. Le RPM pointe en second lieu, l’argumentaire selon lequel, «même si on se limite au PIB par habitant, les réformes, engagées par Ali BONGO depuis 13 ans, évoquées par Monsieur Ilyes ZOUARI dans l’article ont plutôt conduit la population gabonaise vers le chemin de la pauvreté, des inégalités et d’une crise de confiance vis-à-vis des institutions».
Et pour finir, le RPM pointe le fait selon lequel «si M. Ilyes ZOUARI mobilise le niveau élevé du PIB par habitant pour qualifier le Gabon comme le pays le plus riche de l’Afrique, la logique voudrait qu’avec un tel niveau de PIB par habitant, la pauvreté ne devrait plus être une priorité majeure, puisque son taux serait faible. Or, l’observation de l’économie gabonaise montre que la proportion de la population gabonaise vivant avec moins de 3,20 USD par jour est de 15 %». Etc, etc. Question simple : est-ce que le fait de dire qu’un pays est le plus riche sur la base de critères bien définis signifie qu’on occulte ou qu’on élude l’existence de la pauvreté ? Quand on évoque la richesse des pays tels que les États-Unis d’Amérique, la Chine, le Royaume-Uni et bien d’autres nations encore, on met en avant les progrès économiques, industriels (…). Ce qui ne signifie pas pour autant que ces pays n’aient pas de pauvres en leur sein. Il y’a bien des sans domicile fixe (SDF) en France, pays pourtant riche. Le Qatar, pays dont la richesse et les innovations sont vantés partout dans le monde, est pointé du doigt par l’occident à cause de l’esclave humain qui y est pratiqué. Nous pourrons nous étendre davantage sur cette liste. Pour dire en définitive que l’argumentaire de RPM est sans fondement objectif. Surtout qu’il se borne à comparer les chiffres du Gabon avec ceux d’autres pays africains. Ce n’est pas Ali BONGO qui a commandé ce classement, il s’agit du rapport d’une institution internationale de renom. Si ABC veut étoffer ce discours de pré-campagne pour 2023, il devrait creuser davantage.
MEZ
