Société/Environnement
Journée internationale des veuves : 10 ans après, les pratiques culturelles pèsent sur la législation
Le 22 juin 2020, la Fondation Sylvia BONGO ONDIMBA (FSBO) a réuni les experts du continent à l’occasion d’une visio-conférence, pour célébrer le 10e anniversaire de la journée internationale des veuves, autour de la problématique «droits des femmes, droits des veuves : quelle situation en Afrique en 2020 ?». En dépit des avancées constatées sur le plan de la législation, il apparaît très clairement que les pratiques culturelles restent prédominantes.
Venus du Cameroun, du Rwanda, de l’Ouganda et du Gabon, les panelistes ont édifié les participants sur les pratiques en cours dans leurs pays respectifs. Des avancées constatées aussi bien que les freins à l’évolution souhaitée, il a été question de proposer un bilan afin d’élaborer des pistes de solutions adaptées aux sociétés africaines.
Ouvrant les hostilités, le Dr Simone MENSAH, Vice-Présidente de la FSBO a introduit la conférence en rappelant le long chemin parcouru depuis le 23 juin 2011, date de la première célébration. « Aujourd’hui, dix ans après, nous pouvons faire un bilan réaliste et sans complaisance des acquis de la lutte pour les droits des veuves, mais aussi des poches de résistance, parmi lesquelles les pesanteurs socio-culturelles propres à nos cultures africaines, afin de réajuster nos pratiques et de prendre un nouvel élan », a-t-elle précisé.
Les intervenants se sont montrés optimistes quant aux avancées réalisées, en particulier au niveau des réformes législatives et de la sensibilisation de la population. Présentant la situation au Gabon, Honorine NZET BITEGHE, ancien ministre de la Famille et des affaires sociales au Gabon et fondatrice de l’Observatoire des droits de la femme et de la parité (ODEFPA), a expliqué l’évolution législative ayant mené à l’adoption de la loi du 25 juin 2015 modifiant le code civil et renforçant les droits et la protection du conjoint survivant.
Cécile MUKARUBUGA, experte internationale en genre et en développement communautaire, a rappelé que la législation sur le veuvage au Rwanda est intimement liée au génocide. Suite au génocide, des centaines de milliers de femmes sont devenues veuves. Reconnaissant le rôle essentiel des femmes dans la reconstruction du pays, les autorités rwandaises ont adopté des mesures fortes pour protéger non seulement les veuves, mais aussi toutes les femmes en général.
Toutefois, malgré ces avancées, force est de constater qu’il existe encore de nombreux obstacles, notamment culturels et traditionnels, qui ralentissent la transformation de la société tant souhaitée. Dr Maxime HOUINATO, Représentant résident d’ONU Femmes en Ouganda, a notamment mentionné la problématique de la prépondérance des lois coutumières sur le droit positif en Ouganda. Souvent ces lois coutumières sont à l’origine des pratiques discriminatoires envers les veuves et les orphelins au moment de la succession.
Par ailleurs, Martine ONGOLA, Présidente de la Commission « Genre, droits humains et développement » de la section Cameroun du Réseau des femmes leaders pour la transformation de l’Afrique (African women leaders network), a préconisé la mise en place d’un cadre de réflexion favorable et la création d’une plateforme de collaboration au niveau régional pour assurer un meilleur encadrement des veuves en Afrique.
Pour rappel, la Journée Internationale des Veuves a été instituée par la Résolution A/RES/65/189 de l’Assemblée Générale des Nations Unies le 21 décembre 2010, sur proposition du Gabon. Où elle s’est concrétisée par l’adaptation de la législation nationale et par la mise en place d’instruments concrets contre la violence, la pauvreté et la discrimination auxquelles sont régulièrement confrontées les veuves.
